Au milieu du mois de février 2011 éclatent en Libye des manifestations qui dégénèrent rapidement en révolte. En Tunisie et en Égypte, les deux pays voisins, les populations se sont soulevées et ont chassé leurs dirigeants. Le cyberespace a, dit-on, joué un rôle majeur dans le succès des révoltes populaires : on parle des révolutions Facebook. Mais le contexte libyen est différent : la population est moins « connectée » qu’en Tunisie ou en Égypte (§I) ; le régime est décidé à tenir sa place, les rebelles à combattre, la violence qui se déchaîne transforme la révolte en guerre civile ; la communauté internationale intervient ; les armes parlent. Le cyberespace n’en demeure pas moins central dans le conflit (§II), devenant un lieu d’affrontement et un objet de lutte entre partisans et adversaires du régime du colonel Kadhafi. L’après-Kadhafi sera le temps des bilans, mais aussi des révélations (§III).
1. Le cyberespace libyen
1.1 Historique
L’image que l’on a de la Libye n’est pas celle d’un pays high-tech, mais plutôt d’un pays riche (en raison de son pétrole), en conflit avec l’Occident. La Libye de Kadhafi avait des ambitions nucléaires (en 1981, les USA obtinrent la preuve que la Libye cherchait à acquérir de l’uranium enrichi pour construire l’arme nucléaire) ; elle était un État terroriste (attentat à la bombe contre une discothèque à Berlin le 5 avril 1986 ; attentat de la Pan Am sur Lockerbie (Écosse) le 21 décembre 1988 ; attentat contre le DC-10 d’UTA au-dessus du désert du Ténéré (Niger) le 19 septembre 1989). Elle était gouvernée par un régime dont les valeurs s’opposaient à celles des démocraties occidentales (violation des droits de l’homme ; autoritarisme militaire violent). La Libye fut considérée par l’administration américaine comme un État voyou (« rogue state ») - au même titre que la Corée du Nord,...
- Accédez à tous les contenus de Connect en illimité
- Découvrez des listes de lecture et des contenus Premium
- Consultez les nouveaux articles en avant-première