Depuis le mois d’août 2010, le ver Stuxnet ne cesse de défrayer la chronique internationale. Les médias se sont jetés sur cette affaire, comme s’il s’était agi - enfin ? - de la catastrophe majeure tant annoncée (ce fameux Cyber Pearl Harbor que les experts ne cessent de dire « imminent » depuis le milieu des années 1990).D’un côté, les informaticiens ont essayé d’analyser le ver, son mode de propagation, son fonctionnement, concluant qu’il s’agissait là d’un objet nouveau en raison de sa complexité. L’onde de choc provoquée par le ver fut de deux ordres : sa dissémination géographique, semblant se focaliser sur un ensemble de territoires assez précis ; et sa diffusion médiatique, bien plus large semble-t-il (§I).De l’autre, des « experts » ont formulé plusieurs hypothèses (§II) quant à l’origine de l’attaque, ses objectifs, sa nature, ses conséquences sur un plan géopolitique. Mais aucune conclusion ne s’est imposée.Stuxnet est-il une véritable rupture à la fois technologique et stratégique, ainsi que semblent l’affirmer de nombreux analystes ? Les constats vont-ils contraindre à repenser les approches théoriques et doctrinales en matière de cyberguerre ?
1. Stuxnet, l’onde de choc
Le ver Stuxnet est apparu sur le devant de la scène internationale au cours du mois de juillet 2010. Ses premières versions sont toutefois identifiées dès juin 2009 [1]. Le 17 juin 2010, la société bélarusse VirusBlokAda publiait un rapport intitulé Trojan-Spy.0485 And Malware-Cryptor.Win32.Inject.gen.2 Review [2]. Certains analystes attribuent à la société la découverte du ver. Mi-juillet 2010, l’expert allemand Frank Boldewin met en évidence le ciblage par le ver de l’interface SIMATIC de Siemens. Se succèdent alors depuis, à la lumière de quelques analyses statistiques partielles publiées par Symantec et Kaspersky, déclarations et publications de rapports, qui proposent tous leur interprétation des faits, à la recherche de la cible de l’attaque, et bien entendu, des coupables.
Les données statistiques publiées ont une importance capitale : elles conditionnent directement l’interprétation qui est faite du...
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